Bianchimani

Le Délire

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Symptômes étranges... 1er janvier 88. La famille et les conversations insipides. Sommeil mouvementé : le manque d'alcool probablement. 2 janvier, marche quotidienne. Personne dans les rues; les magasins sont fermés. On dirait qu’il y a eu une attaque nucléaire. Chercher un sens à la mort. Les oreilles ont des murs. Il me faut attendre jusqu'en 1989 pour renaître pleinement. 1988 : une année transitoire, ou celle de la fin. Passer à travers, voilà le défi, l'épreuve. Le téléphone sonne mais je suis occupé. Demain dimanche, la journée la plus absurde de la semaine. Fonder une famille, planifier une carrière. Pour être soi-même, il faut d'abord se prendre pour quelqu'un d'autre. Le cercle du vice. Tout est relatif. L'argent est une conception abstraite. On peut écrire n'importe quoi; même plus: on doit écrire n'importe quoi. Boire le matin est un plaisir que peu de gens connaissent. On a beau pousser jusqu'au bout, jusqu'à la limite extrême en pensant de tout faire voler en éclats et qu'il en résulte quelque chose, l'inattendu. Déception. La chose la plus atroce : l'obsession sexuelle. À en devenir fou. Furieux. Aussi bien boire un 26 onces de St-Raphaël.



Vallée de Mexico. Teotihuacan, ancienne capitale aztèque. La flûte du serpent à plumes que j'ai donnée à Jacqueline. Je suis un amuseur pubique. Quand je prenais Anne par derrière et qu'elle me caressait doucement les noisettes en murmurant: “c'est bon, oui c'est bon, viens, viens”; rien que d'y penser, j'en perds la boule. Suzanne n'avait jamais vu un gars se masturber. Un soir, elle me demanda si je voulais me masturber devant elle. Je m'exécutai sur le champ. Pendant que je me branlais, elle demanda si elle pouvait faire quelque chose. Je lui dis de me masser les couilles. Lorsque j'éjaculai, elle se mit à compter les jets de sperme. À son regard, on aurait cru qu'elle venait de découvrir la loi de la gravité. Mon nom est dans un tiroir à la Bibliothèque Nationale et je travaille dans une “shop”. Ridicule. Dimanche, 16:00. Je suis saoûl mort. Et la petite salope de Josée qui me raccroche au nez. Je vais tout casser. “Comment peut-on comprendre qu'il y ait des êtres qui entrent dans notre vie, comme ça, pour un instant, et en repartent, pour toujours?” - H. Miller Absence de Dieu. Le mal triomphera du bien. Le noir bafoue le blanc. La mini-jupe revient à la mode, juste pour me faire rager, je suppose. Dimanche, 18:00, mort saoûl. À Radio-Canada, la 9ème de Beethoven. Trouver la vie. Perdre la mort. Janvier et son froid sibérien. Depuis trois jours, -25 Celsius. Fini la marche quotidienne. Heureusement, l'argent ne manque pas, pour une fois... L'argent, invention diabolique, la plus diaboliques d'entres toutes. Toutes ces femmes qui me détestent. Ca me fait un velours. La haine est de loin préférable à l'indifférence. Comme une mauvaise critique est mieux que pas de critique. Vous ne m'aurez pas. Plus je vieillis et plus je me révolte, plus je ne veux rien avoir affaire avec le système robotique. Les yuppies, le succès, l'économie, le développement, le progrès, le profit, la carrière, tout ça m'est absolument égal. Comme foutre un vibrateur dans le cul d'une sage-femme. Pénis professionnel plein aux couilles désirerait rencontrer vulve mariée pour partager omelette matinale. Je suis propre et discret quand je viens. Viendrez-vous à mon rendez-vous ? Amateure de toast brulées et de Lise Payette s'abstenir. Mon rêve personnel : devenir un vieux salaud. Oui, vieux et salaud. J'aime ta femme, la salope. Elle me fait tout ce qu'elle ne te fait pas, juste pour te faire chier, parce que je bois au lieu de faire des affaires. Elle préfère se faire suçer par un voyou alcoolique que par un singe à cravate. Je torture la haine. J'ai tant souffert que je n'ai plus de coeur. La maladie me fuit. L'alcool tue tous les microbes. La sobriété est une maladie. Où est Dieu ? Dieu est partout, même au Cheval Blanc. Ce matin, j'ai trouvé une machine à écrire sur le trottoir, mais elle ne fonctionne pas. Juste pour me faire chier. Encore un message du destin. Je provoque le destin, mais il se terre dans l'obscurité du futur. La chose la plus importante dans la vie : la bière. Je n'ai rien et je ne désire rien. C'est le bonheur à rabais. “Dans toute femme, il y a un côté putain” - Xaviera Hollander. Si le téléphone ne sonne pas avant quatre heures, je vais retourner au dépanneur.



Samedi après-midi, les yuppies magasinent sur St-Laurent, sur Laurier, achetant plein de bonne bouffe exotique, de vin et de champagne pour le souper et le brunch du lendemain. Ils font une halte dans un café yuppie pour prendre un expresso allongé ou un Perrier, et pour poser où il fait bien de se faire voir. Samedi après-midi, je vais acheter six grosses Black Label et un Kraft Dinner, au cas où j'aurais faim. Un jour, je vais entrer au Café Cherrier et tout foutre à l'envers. Juste pour les faire chier. Bouddha, c'est du boudin. Ma plus grande qualité: être saoûl à cinq heures de l'après-midi. Mon plus grand défaut : être sobre à cinq heures de l'après-midi. Je déteste les Chinois. J'en ai le droit. Détester est un sentiment aussi fort qu'aimer, et on ne peut le nier. Mais où est donc Dieu ? Ah oui, j'oubliais, il est partout, même Au Bon Marché. Qu'est-ce qu'un mystère ? On ne peut l'expliquer parce que c'est un mystère. Vous avez saisi ? C'est clair, non ? Un mystère c'est un mystère, comme un lapin c'est un lapin. C'est simple, au fond. Pourquoi se casser la tête. Il suffit d'appeler les choses par leur nom. Comme le disait un écrivain: “Ce n'est pas moi qui suis fou, c'est vous qui ne l'êtes pas.” Et pour étendre cette maxime : “Ce n'est pas moi qui suis alcoolique, c'est vous qui ne l'êtes pas.” Mettez ça dans votre pipe et fumez. Ah oui, j'oubliais, il est interdit de fumer. Bon, alors - crachez ! Ah bon, il est aussi interdit de cracher. Tant de choses sont de plus en plus interdites dans notre belle société que j'en viens à me demander s'il ne sera pas un jour interdit de respirer. On veut interdire la pornographie. Stupide. Mais que font donc ces âmes bienpensantes lorsqu'elles baisent ? Elles s'embrassent et se chuchottent des mots doux, un point c'est tout ? Allons donc ! Bien sûr, on va invoquer la violence dans les films de sexe. Mais il faudrait peut-être savoir que ce genre de films ne représente qu'une infîme proportion sur tout le lot. Et les femmes offusquées par la porno devraient savoir qu'il y a aussi des hommes dans ces films. Je ne déteste pas du tout être un homme objet quand l'occasion se présente. Et cela n'enlève rien à mon intelligence. Un corps, c'est un corps. Un cerveau, c’est un cerveau. Un cul, c'est un cul. Une âme, c'est une âme. Bon Dieu de merde, où veut-on nous ramener ? La bonne mère Eglise ne ferait pas mieux. Je désire la concierge maladivement. Sa peau laiteuse m'obsède. Je voudrais qu'elle me nourisse au sein. L'été, quand elle porte des shorts et des talons hauts, je me cogne la tête sur les murs. Une marie-salope, une vraie. Et fière de l'être. Elle fait bander tout le bloc. Et quand le bloc bande, il bande, encore plus que le pape devant Madonna. Un jour, je vais la violer, la faire mouiller sur la sécheuse, et appeler la police pour qu'on l'enferme.



À quoi bon s'en faire, il se produit toujours quelque chose, un jour ou l'autre. À chaque peine suffit son jour. Je me masturbe. Qui ne s'est pas masturbé une fois dans sa vie ? Quel homme n'a pas fantasmé à l'idée de deux nègres baisant sa femme toute une nuit ? Que celui qui détient la vérité se le tienne pour dit : je vais la lui voler. Avec force, s'il le faut. Je veux la vérité. Je serai armé. J'aurai la police à mes trousses pour avoir volé la vérité. Je la dissimulerai sous un bandage sur mon corps. S'ils veulent la récupérer, ils devront m'abattre. Je viens dans mon bain et j'observe les particules de sperme se transformer en hippocampes difformes. Mille enfants morts-nés; et tous ces couples infertiles. Quel est votre problème ? Allez, déballez tout, j'écoute. Je me masturbe encore une fois et je viens sur le miroir. Mais à propos, aimez-vous la dinde, à part durant le temps des Fêtes ? J'ai eu beau faire tous les exercices de yoga possibles, je ne suis jamais parvenu à me suçer. Je suis obsédé à l'idée de me suçer. Se suçer soi-même, ça doit être quelque chose ! Ça doit être du travail bien fait. 5 à 7. Six pack. Alcohowl. Je n'ai pas peur du Sida. Je n'ai peur de rien. La meilleure protection contre le Sida, ce n'est pas le condom, mais la téquila. Buvez un 26 onces de téquila par jour, baisez qui vous voulez et vous n'aurez jamais le Sida. Ah bon, vous ne buvez pas. C'est votre problème. Cinq acètes. La veille du Jour de l'An, je suis venu sur mon calorifère. Mon père a encore trois années de travail avant sa retraite. Ensuite, il va devenir fou. Hier, j'ai dormi dehors, juste pour rire. En me levant, je suis allé prendre un déjeuner chez Woolworth. C'était plein de ménagères obsédées qui regardaient le blanc de leurs oeufs comme s'il s'agissait de sperme. Je les clitorise à distance. Une me lance à brûle-pourpoint que son mari est parti au Salon de Chasse et Pêche. Voudrais-je bien lui lécher la chatte entretemps ? Mais pas plus tard que cinq heures, car là il reviendra avec ses “chums”, et s'il me surprenait la tête entre ses jambes, oh la la ! Anne m'envoyait ses petites culottes par la poste d'Halifax. J'insistais pour qu'elles sentent. Quand le facteur apportait le colis, je lui donnais un pourboire royal, défaisais le paquet, flairais les petites culottes et tombais presque inconscient. L'odeur de son vagin, jamais je ne l'oublierai. Ridicule d'avoir peur. Je voudrais partir pour le Portugal et ensuite faire un saut en Tunisie. Il me semble que je serais chez-moi en Tunisie. C'est une nuit dans l’ile grecque de Santorini que je vis la Voie Lactée pour la première fois, d'une netteté incroyable. C'était un état de grace, un moment parfait comme on peut en vivre parfois dans son existence. Comme lorsque je pénétrai dans la Grande Pyramide. Il est aussi de ces moments de félicité qui surviennent dans la plus pure simplicité. Comme aujourd'hui, ce dimanche après-midi, 10 janvier. Le soleil inonde la pièce; à la radio, de la musique grecque; j'ai de l'alcool et j'écris. Je n'ai besoin de rien d'autre. Des instants de bonheur qu'on oublie souvent de savourer. Et le bonheur de ne pas être obligé d'aller travailler le lundi matin. Je me souviens des trois années, il y a longtemps de cela, où je bossais comme un nègre dans une manufacture de textile. Le dimanche toute la journée, ça me foutait des ulcères juste à l'idée que le lendemain le supplice allait recommencer. Comment ais-je pu endurer ça si longtemps ? Mais oui, bien sûr, j'avais une femme à supporter (dans les deux sens du terme). Une petite princesse, un petit bijou, comme elle se définissait. Ce que j'ai pu être naif ! Mademoiselle était beaucoup trop princesse pour aller travailler, trop précieuse, ne serais-ce que d'user ses beaux petits ongles sur une machine à écrire. Que diable foutait-elle avec moi qui était dans la mouise la plus totale quand je la rencontrai ? Elle, une fille de riche médecin du Nord ? Je vivais alors dans une chambre minable près de l'Université McGill, sur Aylmer Street, une chambre où les coquerelles étaient plus nombreuses que les pauvres nouilles que je pouvais m'offrir environ deux fois par semaine. Mais j'écrivais, ah! J'étais un artiste. Elle avait trouvé ça romantique, la petite, de rencontrer un écrivain dans la misère, le portrait du vrai poète maudit, maudit par tous, même sa propre famille. Mais tout ça n'a pas duré longtemps. La petite s'est vite aperçue que la vie d'artiste n'était pas si drôle. Le romantisme s'est vite effondré, et avec lui notre union. Elle rencontra un richard et me laissa choir comme une vieille chaussette. J'eus tout de même de la peine, car malgré ses sales défauts de bourgeoise pourrie, je l'aimais. Oui, comme un beau con, mais je l'aimais. Je croyais qu'elle était sincère. Idiot !



10 janvier 88. Je suis au bout du rouleau. Je l'étire encore. Il casse, net et sec. J'ai mal partout en dedans. Ca fait trois jours que je n'ai pas mis le nez dehors. De toute façon, avec le nez que j'ai et la température qu'il fait, il gèlerait rapidement. Et d'autres tourments. Personne ne veut de moi. Je suis un rebut. “Un renégat, l'opprobe et le rebut du monde.” Victor Hugo. Seul comme un sol mineur. C'est fini, terminé, terminus. 37 ans. Assez. J'ai tout vécu. Le reste ne semble qu'une répétition. Il ne se passe plus jamais rien. Je parle avec Alan au téléphone. Il me rassure. J'ai rencontré l'alcool avec un grand A. Depuis, nous sommes toujours ensemble. C'est la passion. Nous nous aimons comme des fous. Je suis fidèle à ma bouteille. Je ne la trompe jamais. Elle au moins ne me laissera pas tomber. REER, REA. Bon Chic Bon Genre. La Taverne du Marché, vous connaissez ? Ah, vous préférez l'Express ou le Lux. La gentrification. Jambon Chic Jambon Genre. Mec à moustache en Trans-Am fréquentant l'Horizon Disco Club, en bottes beiges de City Shoes et jeans Suzy Shier des Galeries d'anjou. Pierre Péladeau est né tellement laid qu'il n'avait pas le choix de devenir riche. Sous quelle étoile suis-je né, chantait Polnareff. Polnareff le beatnick; la bohème de Paris. Françoise Hardy. Tous les garçons et les filles de mon âge. Montmartre. Regarder Paris, au pied du Sacré-Coeur, comme disait Miller. Pourquoi ais-je laissé tomber la petite Josée pour cette bornée et têtue de Suzanne ? Faire un budget de boisson. Ce qui compte, c'est l'effet, non pas le produit lui-même. Défaire les concepts, déjouer les normes. Etre heureux avec le minimum. Le trop plein d'émotions. Je pisse des larmes. Les ombres sont beaucoup plus longues dans le désert. Tout mon être est compulsif: je suis un fumeur compulsif, un buveur compulsif, un baiseur compulsif. La vie qu'on dit normale ne m'intéresse pas, mais alors pas du tout.



Mardi, 12 janvier. André et moi ratons la dernière représentation de Barfly. Que faire ? Nous décidons de marcher sur Ste-Cathy vers St-Larry. Nous buvons nos quatre canettes de bière en chemin (canettes destinées au film). Coin Ste-Cathy et St-Larry, décidons d'aller chez Peeters. L'endroit est presque désert. Puis les parias pénètrent peu à peu. Une poupoune et un macho à moustache, entre autres. André clanche. La fille ressemble à Claude Valade en putain. Il veut la jacker dans les toilettes. Je lui suggère de se contrôler, sinon on aura le macho sur les bras. Deux jeunes midinettes font leur entrée, bottes aux cuisses, super make-up, salopes. Elles ne doivent pas avoir plus de vingt ans. Elles sentent le sexe à distance. Moi et André, vieux salauds, nous sommes bandés comme Iggy Pop.



Samedi 16 janvier, 17:00, je sors de chez Peeters grisé comme le jour qui tombe. Une jeune pute m'accoste. Elle doit avoir à peine 18 ans. Je la dévorerais, mais je n'ai pas assez de fric. Reviens chez-moi en achetant un litre de cidre en route. La vie n'a plus de sens. En a t-elle jamais eue ? Blaise Cendras et Beethoven: deux handicapés et génies. “Quand une femme couche toute seule, c'est une honte pour tous les hommes.” - Zorba le grec. L'alcool, c'est l'anarchie, le rejet de toutes les normes, les conventions, les manières. Beaucoup de poètes sont alcooliques parce qu'ils aiment prendre un vers. Les jours sont trop longs. Mon happy hour est de 7 à 5 tous les jours. Je me souviens de Rouen, de la place où on a brûlé Jeanne d'Arc (1412-1431). Je voudrais relire François Villon (François de Montcorbier, 1431-1462). Villon, le premier poète rebelle, le Robin des Bois de la poésie. Je fume parce qu'on est cendre et qu'on retournera cendre. Je ne peux plus aimer, mais je peux encore haïr. Halifax, février 1984. Anne m'accompagne à la gare après deux semaines passées ensemble. Le train part à 16:00 et à 19:00 je suis saoûl et je m'endors dans le wagon-bar. Le serveur me réveille et me prie de quitter les lieux, d'aller dormir sur mon siège. Je lui demande ce que j'ai fait de mal. “Vous dormez et ça dérange les gens”, qu'il me répond. “Quoi ? Que je dorme, ça dérange les gens, vous dites ?” Et là-dessus j'éclate de rire. Puis je continue: “Est-ce que par hasard ça dérange les gens lorsqu'on respire ? Moi, cher monsieur, ce qui me dérange, c'est que les gens soient si cons !”. Je me lève aussitôt et sors. En chemin vers mon wagon, je croise un préposé et lui demande s'il y a un autre bar dans ce foutu train. Il me répond qu'il y en a un autre à l'autre extrémité. Je m'y dirige d'un pas alerte. J'ai une de ces soifs incommensurables que j'en boirais tout le St-Laurent et les Grands Lacs si c'était de la bière. Je suis alcoolique pour emmerder les cons. J'adore emmerder les cons. C'est mon sport favori.



Léo Ferré, à propos des poètes: “Ils s'habillent mal parce qu'ils n'ont pas d'argent, ils ont les cheveux longs parce que l'échoppe du coiffeur est un enfer imbécile.” La vie finit à quarante ans. Je prépare mon suicide. Je vais aller mourir à Paris. Je vais louer une chambre à l'Hôtel de la Loire et acheter de l'héroine, puis m'injecter une overdose. Mourir à Paris, c'est tout de même mieux que de mourir à Pointe-aux-Trembles. Suis-je en train de devenir fou ? 13 bouteilles de cidre sur le plancher de la cuisine. J'écoute l'opéra du samedi à Radio-Canada. Dehors, un chat miaule à plein poumons; une lamentation de ruelle. Puis une sirène d'ambulance. Je vais appeler les pompiers et leur dire de m'emmener à Hypollite-Lafontaine. Bref, j'aurai un bel enterrement. La mort est beaucoup plus forte que la vie. Plus tard, c'est Lavilliers qui râle. Ma dernière flamme n aimait pas Lavilliers, a cause de ses gros bras. Mais elle trouvait Daniel Lavoie séduisant, Lavoie et sa musique de pédé. J'aurai 37 ans le 27 mars prochain. mais je ne vis plus. Je végète. Et je ne suis pas végétarien. Ça doit être un sort jeté pour les années où j'ai pratiqué la magie noire. Venant de qui ? D'Aleister Crowley ? De Rabelais ? La solitude a ses limites de tolérance. Je ne peux plus l'endurer. Il va me falloir confronter le diable sur son propre terrain. Je sais où et quand : sur le Mont-Royal, au pied de la croix, à la pleine lune. Chérie, fais-moi des cochonneries, sois putain pour un soir. Je serai Clyde et tu seras Bonnie. “Love will tear us apart.” - Joy Division. Il me reste deux choix: tuer quelqu'un ou me tuer. Il paraît que je deviens plus beau avec le temps. C'est à cause de l'alcool. L'alcool garde jeune. Le lait enlaidit. Ca vous fait chier, alors chiez !... J'ai 37 ans et j'en ai l'air de 27, et pourtant ça fait vingt ans que je me défonce.



Le passé est trop présent et le futur trop absent. Que faire alors ? L'automne sonne le glas et je voudrais être ailleurs. À Paris ou à Athènes, par exemple. Quitter cette damnée Amérique, ne serais-ce que pour un an. Pour toujours serait beaucoup mieux, évidemment. Cette fille, je voudrais ouvrir sa parenthèse et y introduire mon verbe à l'infinitif. J'écoute une pièce d'un ensemble de jazz viennois dont le titre est : “à propos du fait de garder son coeur droit.” La vie est dure, mais elle va se rendre compte que je suis plus dure qu'elle. La vache, elle ne l'emportera pas au paradis. Les femmes, parlons-en des femmes. Ces fameuses femmes. Ce qui m'exaspère le plus en elles, c'est le sexe. Elles ont l'air de considérer leur corps - et particulièrement leur vagin - comme un temple sacré, un sanctuaire - un cénate, ma foi ! - où n'a accès que le béni d'entre les bénis, c'est-à-dire le séducteur ou le millionaire. Mon cul ! Comme si enfiler une femme était comme pénétrer dans la Grande Pyramide de Khéops, le Taj Mahal, la Chapelle Sixtine ou encore les ruines de Babylone. Non, mais vraiment, pour qui se prennent-elles ? Un vagin est un vagin, non pas un objet du culte. Et la tendresse. Parlons-en de la tendresse. Le cul à l'eau de rose, le cul fleur bleue. Les seules femmes avec qui j'ai baisé et qui atteignaient facilement l'orgasme - sans le simuler - n'en avaient rien à foutre de la tendresse. Elles étaient vicieuses, perverses, elles savaient que la jouissance n’a rien à voir avec des mots doux en leur frottant le clitoris, du genre: “Oh ma déesse, regarde comme le plafond est bleu et comme les petits ressorts chantent de beaux couis-couis !”



Je me tue à force de vivre. Je déterre ma tombe et j'aspire à l'air libre, mais à nouveau on me condamne comme un proton neutralisé. Le sel de la terre est amer. À la télévision : Lettres d'amour de Somalie. Je suis seul et saoûl, sans le sou et sensuel. L'histoire se répète constamment. La farce a assez durée. Pressez les boutons et faites sauter cette plate planète, ce satané cailloux... La vie est une connerie de trop dans l'univers. Le téléphone est décroché. J'essaie de m'endormir après avoir signalé la contradiction en moi-même, en quelqu'un que je ne connais pas encore, un visage aperçu dans le métro hier. Dear inconnue, où es-tu ? Pourquoi te caches-tu où je ne vais jamais ? J'essayais d'attirer ton regard lorsque tu sortis soudain à la station Vendôme... J'ai signalé un numéro au hasard, inconsciemment, essayant d'atteindre et de faire ressurgir les différents personnages qui nous torturent consciemment, ces multiples acteurs que nous sommes maladroitement chaque soir, commes des clowns tristes pris au piège de leur tragédie quotidienne. Allongé mur à mur comme le tapis, je m'enroule sur moi-même dans une identité perdue pour oublier que nous sommes mortels. Au matin, en me rasant, je me coupe. Le sang coule sur la mousse. Je me rapproche du miroir pour voir l'évidence me dévisager. Puis je remarque une citation griffonnée sur le mur : “Rien ne sert d'agiter nos petites ailes, car nous sommes tous collés au tue-mouche de la vie.” Je me fais un verre et m'assois devant les piles de papier blanc sur mon bureau et qui, en ce moment, ressemblent à des draps d'hôpital. Je me demande comment transcrire ces pattes de mouche. Je bois quelques gorgées de pinard et, regardant par la fenêtre, je vois que le cours d'informatique vient de débuter au Collège Dawson. Je ressens cette étrange sensation qui ne me quitte plus depuis trois semaines : je me sens comme une machine à écrire...



Un soir, il y a environ sept ans de cela, j'ai couché avec un travesti déguisé en Jean Harlow. Mes amis me disent que je prends des risques, mais ce que j'adore dans les risques, c’est qu'ils ne sont jamais sûrs. Je déteste les choses sûres. Je ne suis pas un vendeur d'assurance ou un preacher américain. Celle qui m'obsède récemment, c'est une tunisienne qui vit à l'étage inférieur. Lorsqu'il fait chaud, torridement chaud et que sa porte est entrouverte, j'ai envie de descendre à poil chez-elle et prendre son clitorisque comme si c'était le liquide d'un oasis après la traversée du désert... comme Rimbaud suçant un chameau femelle après 20 jours en Somalie. Je trébuche sur mes mots, m'effondre contre mes phrases et fracasse mes paragraphes. À l'intersection du passé et du futur, je suis le meurtrier qui poignarde de destin : je serai pendu au présent. Les mensonges crus enfin délivrés, le flot de bave absurde qui écume le jour maladif lorsqu'on perd le sud, lorsqu'on boit l'austra jusqu'à la lie. Oui, je me sens comme Belzébuth quand je me bute la tête contre l'enfer des pissoirs du désespoir et que plus tard je m'y endors dans les bras des rats du delirium tremens qui pestent contre moi, une figurine dans l'urine, que je rampe dans les méandres véreux de la survie en n'étant qu'un morveux incompris. Mais à quoi bon passer sa vie à se justifier, si ce n'est que pour effacer cette culpabilité tatouée dans le bénitier syphillitique ? Cette nuit j'ai peur et j'écris pour ne pas crier cramoisi. Il a plu toute la journée. J'ai compté les gouttes et me suis finalement assoupi. Vers 18:00 heures, j'ai appelé ma mère pour lui dire que je n'ai pas le Sida même si j'ai baisé la fille louche l'autre soir dans le corridor du building. La culture... Ouais... Mais qu'est-ce donc que cette culture dont parlent tous ces écrits vains ? Je suis cultivé, moi, monsieur. J'ai lu toutes les oeuvres complètes de Claude Blanchard. Cela vous en bouche un coin, n'est-ce pas ? Oui, je sais, le cancer donne la cigarette et la cirrhose donne l'alcool. Je viens de téléphoner à mon éditeur pour lui faire part que les mollusques m'intéressent au plus haut point. L'intérieur de mon réfrigérateur commence à ressembler à une expérience biochimique, mais ça c’est confidentiel, entre nous, n'en parlez surtout à personne. Que vous alliez dire à tout le monde que j'aime me regarder dans le miroir lorsque je me masturbe, ça m'est égal, mais pour ce qui est du réfrigérateur, je ne le vous le pardonnerais jamais. Je suis sérieux, très sérieux, et quand je me fâche je mords, entre autres... Vous voulez savoir ce qu'est la véritable tragédie: dès la naissance, nous sommes condamnés à mort. Point à la ligne. Je me suis enivré vivant avec un chat noir qui n'a que Poe et les os. Dans un jardin en pleurs, je cultive des crises en thèmes. Demain matin, les gens retourneront bosser sur le marché du bétail. La richesse est un luxe qu'on ne peut plus se payer. Le Pape vient de réaffirmer l'existence des anges. C'est aussi rassurant que Jean Coutu. Je relis une coupure de journal disant que les ventes de cosmétique ont été de l'ordre de 1,4 milliards l'an dernier au Canada. Pour maquiller quoi ? La réalité ?



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J'en ai assez du terrorisme affectif des femmes. Berlin. Une journée grise. Comme le mur. Il faut que je retourne dans le secteur français pour tourner quelques scènes de plus pour mon film. En m'habillant, je sens le parfum de Ulla imprégné dans mes vêtements. Je dois la rencontrer à quatre heures au Wintergarten, ce qui nous laissera quatre autres heures avant qu'elle ne prenne son poste sur Kurfurstendam strasse (Ulla est prostituée).



(il paraît que si nous mettions bout à bout tous les rêves que nous faisons dans notre vie, ça totaliserait environ quatre ans de rêves.)



Je prends le métro à la station Am Zoo jusqu'à Leopoldplatz. De là, transfert sur l'autre ligne jusqu'à Reinickendorfer, près du mur. Cette partie du quartier français longeant le mur est assez délabrée; plusieurs édifices sont abandonnés. Toujours cette présence de la guerre, comme si elle s'était terminée il y a quelques mois. Je dois quitter Berlin dans trois jours pour Paris (selon le plan de voyage établi avec ma femme au départ; elle est à Chypre et me rejoindra à Paris le lendemain de mon arrivée). Lors de notre rencontre, j'avais dit à Ulla que j'étais à Berlin pour un temps indéterminé, ce qu'elle interpréta comme étant de longue durée. En revenant du secteur français, dans le métro, j'en vins à l'évidence qu'il fallait lui annoncer la nouvelle de mon départ. Je ne savais trop comment lui dire. Pauvre Ulla, 18 ans, qui avait quitté Dusseldorf et sa famille pour venir dans cet enfer pratiquer le trafic de la fesse, en rêvant de faire du fric et d'être indépendante. Pauvre Ulla qui s'était entichée de moi apres que je sois allé au bordel comme client. “Tu es gentil, tu n'es pas comme tous les autres”, m'avait-elle dit en sortant du lupanar. Pourrait-on se revoir ? Qu'est-ce que tu fais dans la vie ?” “Je suis écrivain” lui répondis-je, sans réfléchir à ce que je venais de dire. Une flamme jaillit de ses yeux: “alors, tu écriras un jour sur moi ?”. J'arrivai au Wintergarten avant l'heure. Je commandai une weisenbier et essayai d'élaborer un discours pour Ulla. Mais je ne parvenais pas à imaginer quelque chose de sensé, quelque chose qui ne lui ferait pas de mal. Surtout que la veille, Ulla m'avait dit que nous pourrions peut-être vivre ensemble, elle pratiquant son métier et moi écrivant; même qu'elle pourrait me dénicher quelques travaux occasionnels consistant à écrire des trucs pornos pour des revues jaunes.



Ulla arrive. Elle a un cadeau pour moi. J'ouvre le paquet: c’est une ceinture cloutée. “Pour un écrivain rebelle” dit-elle. Nous commandons des apéritifs. Ulla est d'humeur joyeuse. Elle est radieuse. Pour ma part, j'ai plutôt la mine patibulaire. Elle le remarque: “Qu'est-ce qui ne va pas ?” Je suis cloué sur place, incapable de lui répondre. Après quelques verres, je déballe finalement mon histoire: je pars dans deux jours pour Paris, voilà. Elle ne veut pas le croire. “Pourquoi, why my love ?”. “Parce que c'est ainsi” dis-je, “parce qu'il faut bouger, changer d'endroit”. Son regard disait tout. Elle était complètement défaite.



A l'aéroport Tegel, j'ai des remords. Ai-je vraiment envie d'aller à Paris retrouver ma femme ? Je sais très bien que tout est foutu entre nous. Je m'en doutais lors de notre arrivée à Athènes. La Grèce que nous retrouvions après trois ans et ou nous avions été extraordinairement heureux. Mais maintenant les choses étaient très différentes; en fait, tout avait changé, je veux dire à propos d'elle. Ce n'était plus la même personne, à un tel point que je me demandais qui elle était vraiment. Etait-ce possible de vivre pendant sept ans avec quelqu'un sans connaître sa vrai personnalité, son moi intérieur ? Cette simple question me rendait totalement désemparé. Lorsque nous quittâmes la Grèce, ce n'était plus ce sentiment d'un souvenir exaltant qui m'emplissait, comme trois ans plus tôt, mais un vide atroce. Puis vint ce séjour à Chypre où j'eus l'impression qu'elle s'acheminait lentement vers la folie. Ses agissements me boulversaient à en blêmir sous le soleil de plomb de Larnaca. Un soir, dans un pub sur le bord de la plage, j'en conclus que nos vies respectives prenaient une tangeante opposée, que nos chemins se séparaient définitivement. Peut-être avions-nous accompli ensemble ce qu'il y avait à accomplir... Cette évidence se concrétisa par la suite en Egypte, dans la Vallée des Rois, un après-midi où elle m'annonça qu'elle ne venait pas avec moi à Berlin, qu'elle retournait à Chypre, qu'elle avait besoin de respirer, de vivre seule pendant un certain temps (i.e. avec son amant de Larnaca), bref de ne plus voir ma gueule.

La veille de mon départ de Berlin, je passai chercher Ulla à son appartement sur Ullan strasse (drôle de coïncidence). Nous allions faire la foire au Metropol Club. Nous avions quelques heures devant nous avant de se rendre au club. Ulla avait acheté des vins allemands et du champagne. Après deux ou trois bouteilles, je lui parlai de ma relation avec ma femme, chose que je lui avais cachée jusque là. Elle me supplia de ne pas aller la rejoindre à Paris, que cela allait me faire du mal, qu'elle allait encore me torturer. Elle me suggéra de passer le reste de mon séjour en Europe à Berlin. Je ne savais trop que faire. J'étais écartelé entre deux choix qui, chacun, comportaient un risque. D'une part - et elle avait sans doute raison sur ce point aller rejoindre ma femme à Paris représentait une sorte de cul de sac, de suicide. D'autre part, rester à Berlin m’angoissait, en ce sens que je pourrais trop m'attacher à elle et à cette ville qui me fascinait, à l'idée de vouloir m’y installer, moi qui ne parlait pas un traître mot d'allemand. Ce qu'il pouvait être difficile et déchirant de prendre une telle décision.



5:00 am, je me réveille, torturé par je ne sais trop quoi. Cet étrange malaise qui ne me quitte plus. Le soleil n'est pas encore levé, le salaud. Je serre mon oreiller en pensant à Huguette. Je me lève et descend un 6-pack de Black Label en fixant le mur jauni par les Number 7. Je regarde les “stripes” sur l'écran de la TV en attendant qu'un poste revienne à l'antenne. Certaines journées comme celle-ci, le sentiment de solitude est insupportable. Mais je lis Bukowski et je me saoûle. J'arrive difficilement à mettre un mot devant l'autre. À huit heures, le 10 entre en ondes. Je vois Jacqueline faire sa chronique d'astrologie. Je repense à notre liaison et n'arrive pas à y croire. Je vais téléphoner à sa soeur pour en avoir la certitude. La bêtise n'a jamais tué personne, sinon cela ferait des lustres que la planète serait inhabitée. Mon père a en sa possession assez d'armes pour tenir un siège d'une semaine à Beyrouth. Si j'achète Le Devoir, c'est simplement pour me masturber dedans et venir sur les lèvres de Nathalie Petrowski. Au Motel Desperado, je ne vis plus qu'avec des fantômes et des fantasmes, je ne parle qu'à des épaves, des anges déchus qui dorment dehors sous une plaque de tôle. Un matin, dans la section des chiens écrasés et des fuites de gaz, mon nom apparaîtra, comme un suicide sans importance et la vie suivra son cours. Tout ce cidre dégueulasse que j'ai bu, la nuit où tu es venue me dire que tu t'en allais. Je bande donc je viens. Je viens donc je vis. Je vis donc je meurs... Les jeunes collégiennes de Dawson me traumatisent pelviquement. Le matin, quand je vais pisser à poil, elles me voient par la fenêtre. Un jour, je leur ferai un show. Il fait chaud et j'ai besoin de peau. La vie ne vaut pas le cul. Je saigne. Je sais tout et je ne sais rien. Et je saigne. Ne suis plus capable de sortir de chez-moi, sauf pour aller acheter de la bière. Une semaine que je ne me suis pas rasé. Je m'en fous, je n'ai pas de femme. Mais j'ai de la bière. Elle m'a juré fidélité jusqu'à la mort. Je me suis marié avec la bière, la belle petite bière blonde.



Samedi soir. J'écoute Amour/Anarchie de Ferré. Seul, comme d'habitude. Je ne peux plus supporter la rue St-Denis et ses poseurs. Je ne peux plus supporter les femmes aux bas nylon noir à l'ère du Sida. Personne ne baise et tout le monde provoque. Les soixante-huitards sont en majorité devenus plus conservateurs que mon grand-père. Les jeunes recommencent à se marier et à vouloir fonder une famille. Je désire détruire une famille. Le condom c'est con. Les massages de réflexologie c'est de la connerie. Le macrobiotisme c’est du débilisme. L'aérobique c'est hystérique. Nous sommes des animaux, après tout.



Toujours samedi soir. C'est toujours samedi soir. Je regarde les escaliers de secours en face de ma fenêtre. Je finis ma première caisse de bière. C'est pas grave, il y en a une deuxième. Et il y en aura une troisième s'il le faut. Le téléphone est muet, mais les haut-parleurs crachent la voix rauque et râleuse de Kathie McDonald qui chante “Heartbreak Hotel”. Je suis prisonnier dans ma cellule. Allez-vous me visiter dans ma cellule ? J'ai un tourne-disque “cheap”, parfait pour le rock 'n' roll et une enseigne de one-way volée sur les lieux d'un accident. J'ai des photos de mon enfance et une seringue tachée de sang. J'ai plein de passion et un frigidaire vide. Je ne t’ai même pas et déjà tu en as assez de moi. Je dis à tout le monde que je n'écris plus parce que je n'ai pas de machine à écrire. Peut-être est-ce un jeu que je me joue... J'essaie d'échapper aux faits, et sans doute qu'en marchant sur cette corde raide, je vais perdre pied un jour et on trouvera ma dépouille dans une poubelle. Je suis définitivement fou. Hier, j'ai bu une bouteille de mauvais vin parce que je me faisais du mauvais sang. Ensuite, je me la suis cassée sur la tête. Puis, je suis allé répondre à la porte : c'était des Témoins de Jéhova. Je voulais tuer. Hier aussi, je me suis échappé et me suis retrouvé au Terminus Voyageur. J'ai regardé les panneaux indicateurs pendant quelques minutes, mais je ne comprenais rien, comme si c'était du chinois. Et, comme je l'ai déjà dit, je déteste les Chinois. Avant de repartir, j'ai déposé ma valise pleine de manuscrits dans un locker. En remontant la rue, j'ai jeté la clé dans un trou d'égout. De retour à la maison, dans le corridor au deuxième étage, je vois une fille étendue devant une porte, un 26 onces de whisky à la main. Elle murmure quelque chose. Je lui demande ce qu’elle fait là. Elle me sourit et dit qu'elle attend quelqu'un, mais que si par hasard je veux la baiser je peux, car elle n'a rien d'autre à faire. Je m'exécute docilement tout en lui chuchotant les obscénités les plus abominables. Elle semble apprécier en me répondant avec des mots encore plus sales. Quand c'est fini, je lui offre de venir dormir chez-moi, que je me comporterais comme un bon garçon et que je dormirais sur le sofa et elle dans mon lit. Elle se met à rire et accepte sous une condition : je dois dormir dans la salle de bain, pendu à l'envers après le rideau de douche. Je lui dis que je suis d'accord. Cette nuit-là, j'ai fait un rêve étrange. C'était tard un jeudi soir. J'étais sobre (ce qui n'es pas normal) et je regardais la télévision. Mon ange gardien et le diable s'engueulaient à mon sujet. Soudainement, le diable saisit mon jack-knife et poignarda l'ange gardien droit au coeur. Complètement sidéré, j'échappai ma cigarette sur une pile de livres que le diable avait arrosé de gazoline. L'appartement se remplit rapidement de flammes. Le diable se mit à crier et tomba sur le plancher, dans une sorte de transe. Lorsque l'ange gardien retira le couteau de son corps et me cria de sortir au plus vite, je m'enfermai dans le frigidaire. Et il s'envola par la fenêtre. Au bout d'une heure, je sortis du frigidaire et je me dirigeai vers les escaliers de secours, j'ouvris la porte et me retrouvai dans un cinéma où était projeté “À Bout de Souffle” de Godard. En état de panique, je sortis du cinéma par la porte arrière et débouchai dans un parking. Je sautai dans une auto, mis le contact, mais le moteur refusa de démarrer. Je faillis avoir une crise cardiaque. Je m'éveillai en sueurs, toujours pendu à l'envers. Je tâtai mon pouls, vis une fille dormant dans mon lit, mais ce n'était pas toi.



Sept ans de détention dans la prison de Spleen State, jusqu'à mon évasion avec un drap text made. Sept ans fermes pour l'assassinat de mon double. Dans une auto volée je fuis. Ils veulent ma poésie; ils sont à mes trousses dans des autos-patrouilles blue-print. J'en ai marre du noir. Je ne crois plus au mirage. Je défoncerai leurs barrages. Dans la poursuite infernale, j'ajuste le rétroviseur et je vois défiler la souffrance inutile, s'envoler les manuscrits le long de l'autoroute, comme des impressions évanescentes. Je ne reviendrai plus derrière les barreaux de l'inspiration. Je file vers un roman neutre où ils ne pourront plus m’arrêter. Un poing, c'est tout. Il voulait mon scrotum, mais je n'aimais pas ses bagues. “Es-tu aux travestis ?”, me demande-t-il. “Non, aux amphibiens.”. Je commandai treize scotchs et des poppers.... La soirée allait bon train, tout roulait sur des billes, sur des couilles, quoi. Mais je rêve de posséder Suzanne Lévesque dont les yeux éveillent en moi des désirs jusque-là inconnus. Si elle le désirerait, j'arrêterais de boire, je m'achèterais une tondeuse à gazon, je lui ferais son petit déjeuner, et je l'embrasserais sur le nombril à minuit ou à midi, selon ses caprices.



Les femmes m'exaspèrent. Elles se prennent pour le nombril du monde. 80% de la clientèle psychiatrique sont des femmes. Les fameuses femmes. Si ce n'était pas pour le sexe, j'y renoncerais définitivement. Et encore là, pour le sexe, ce n’est pas toujours très fameux... Je préfère souvent me branler. La décennie 80 est la plus idiote depuis ma naissance. Complètement futile. Depuis deux mois, j'ai un emploi. Je peux maintenant me foutre de tout. Je peux tenir le haut du pavé. Je peux baver et ne pas être obligé de le regretter. Je lis la section “Compagnons-Compagnes” de La Presse et je rage. Toutes ces exigences insipides. Particulièrement les femmes. Environ 8 femmes sur 10 veulent un homme financièrement à l'aise. Rarement un homme tient un tel discours. Et ces dames exigent en plus qu'il soit beau, séduisant, 5 pieds 9 et plus, mince, non fumeur, généreux, et tout le reste de conneries. Elles se disent “libérées” et agissent encore comme avant. Au fond, elles ont le beau jeu. Je suis complètement dégoûté. Des Dames de Cul. Je suis comme Mickey Rourke dans “Barfly” et je cherche ma Faye Dunaway. Mais elles ne courent pas les rues. Je préfère de loin les femmes du Midway que celles de Chez Swann. Suis beaucoup plus attiré par Dolly Parton que par Louisette Dussault. Par Josée Yvon que par Louky Bersianik. L'homme nouveau. Autre connerie. La bêtise est devenue si évidente qu'on peut se demander si on régresse au lieu d'évoluer. Mon ex-femme se marie. Tant pis pour elle. Elle m'envoie une invitation. J'y serai peut-être. Saoûl, comme d'habitude. Maintenant que j'ai de l'argent, je suis un alcoolique heureux. Et ne m'emmerdez plus avec la boisson. C'est mon affaire. Ça ne vous regarde pas. Si vous ne le prenez pas, alors disparaissez, faites de l'air. J'en ai rien à foutre de vos reproches. Une vie saine. Mon cul ! Les A.A. Ah ! Ah ! Selon mon ex-amante astrologue, j'ai la même carte du ciel que Pierre Péladeau. Mais je ne suis pas millionnaire et je ne suis pas laid. C'est mieux ainsi. Qu'est-ce que je ferais avec des millions ? Je péterais de la broue et je ne boirais plus de bière, comme ce monsieur Pierre ? Message publicitaire genre personnel: “Depuis que j'ai un emploi, je peux enfin pratiquer mon sport préféré : boire de la bière.” À force de conditionnement physique, les gens font du conditionnement psychologique. Avez-vous déjà vu un porc faire du jogging ? Un boeuf faire des poids et haltères ? Un zèbre faire de la bicyclette stationnaire ? Un lion jouer au squash ? Les gens sont cons, s'en est pas croyable. Pas étonnant que les extra-terrestres ne veulent pas nous contacter... nous sommes tellement imbéciles. Ce matin, je baiserais une mule tant ma libido est forte. Le sperme me sort par les pores de la peau. Je suis bandé comme le Cardinal Léger devant Joan Collins. Je vais m'inscrire à l'UQAM et faire ma thèse de maîtrise sur le double dans l'oeuvre de Roméo Pérusse. Depuis deux semaines, j'ai posé ma TV à l'envers. C'est plus divertissant. Surtout pour les films de monstre japonais. J'ai envie de sniffer du Tide.



Je bois du vin et je viens. Je songe aux doigts de la petite Jessie s'enroulant autour de mon gland. Mon batt' de bandit dans sa plote de poupée. Ses petites fesses sous mes mains. Je veux manger son corps. Le Poète et la Putain. “L'âme des putains lorsqu'elles ont été mariées.” - Léo Ferré. Vous n'êtes pas fou, vous dites ? Venez me consulter. Je donne des séminaires sur comment vivre sa folie sainement. Nous pourrons peut-être nous masturber réciproquement, ça change les idées. Les chats retombent toujours sur leurs pattes. Moi, je retombe toujours sur mes couilles. Ça fait mal. Très mal. Mon père vient de m'appeler pour me dire qu'il m'a acheté une montre. Je me fais un spaghetti avec sauce au Ajax. Demain, André et moi allons faire la tournée des clubs de danseuses nues. Les plus cheaps. Pour trouver les filles les plus sales, les pires trainées de la planète. Des bars où ça sent le sperme, le vieux sperme. Le sperme c'est comme le vin, plus ça vieillit, plus c'est bon... Je rêve de mettre mes hémorroïdes, dans le visage de Stéphanie de Monaco. J'ai l'air intelligent, mais je suis un mongol, un débile profond. Il ne faut pas se fier aux apparences. Je ne peux plus réfléchir, mais je peux encore fléchir. Comme devant les lèvres de Shirley Théroux. Un jour, il y a longtemps de cela, je me suis couché et j'ai réussi à m'endormir... Le jour et la nuit, c’est pareil. Ce n'est qu'une question de temps. Vous voulez savoir pourquoi Hubert Aquin s'est suicidé ? Parce qu'il ne pouvait plus avaler ses crottes de nez. Non, mais mettez-vous dans ma peau... Je suis nu et je me regarde dans le miroir. Je ne suis pas si mal, après tout. Je coucherais avec moi. Pourquoi Huguette ne m'a jamais sucé?  Pourquoi m'a-t-elle fait ça ? La vache, la chienne, la putain. Je donne des cours de sexobique. Comment se masturber en faisant du jogging. Croyez-vous à la vie avant la mort? Moi, j'en doute. Dimanche matin, dix heures, j'écoute la messe à la télévision en buvant une grosse Dow. C'est passionnant. Après, je vais écouter les preachers américains et l'émission de Fernand Gignac. Faut bien se cultiver. Je fais l'amour avec ma guitare. Elle jouit dans l'ampli. Je viens dans le pick-up. Naître ou ne pas naître, comme dirait un certain con. Si je travaille encore dans un an, je vais aller à Paris et boire tout le pinard des bars. La Seine aussi s'il le faut. Je me souviens quand mon ex-femme vomissait sur le bord de la Seine. Je me souviens quand elle baisait avec un nègre pendant que je dormais, saoûl mort. Le lendemain, alors que je rentrais de chez mon éditeur, je la surpris en train de s'envoyer en l'air avec le même nègre. Le pauvre mec devint presque blanc lorsqu'il me vit entrer dans la chambre, à l'Hôtel de la Loire. Il bafouilla, s'excusa, mit ses culottes en tremblant et dit qu'il s'en allait. Je lui dis d'enlever ses culottes et de continuer sa besogne, que pour ma part, je devais corriger les épreuves de mon texte pour l'anthologie. Plus tard le soir, on alla manger tous les trois dans un restaurant chinois. Et on dira ensuite que je ne suis pas un bon gars... Franchement Linel. Dimanche midi, assis devant la machine à écrire, déjà six Labatt Bleue de bues, je déconne. Je me rappelle quand j'avais cinq ans, quand mon père était un motard et que nous filions sur sa BSA sur l'autoroute, moi assis entre lui et ma mère, mon père avec son blouson de cuir, un aigle dans le dos, et ma mère en jeans noirs et jacket rouge. Souvenirs Souvenirs, comme chantait Johnny Halliday. Je suis tellement écoeuré des femmes que je pense que je vais devenir homosexuel. Mais je rêve quand même de suçer La Poune. D'enculer Pierre Péladeau. Je ne suis jamais malade, pas même un léger mal de bloc. Pourtant, je fume comme une cheminée et je bois comme un trou. Ca fait rager les autres, qui mènent une petite vie rangée, qui prennent soin de leur santé et qui, malgré tout, sont régulièrement malades et toujours fatigués. Les couilles me piquent. Je les gratte. C'est normal. Avez-vous quelque chose contre ça ? Kafka était un cas, vous en conviendrez. Il aurait fait un bon avocat. Les silences compacts. Les valises muettes. Non Non Non. Nom d'un chien ! Pardi ! Parbleu! La La La. Bon, ça suffit. Alors, vous disiez ? Oui Oui Oui. Ah bon ! Intéressant ! Pourquoi ne m'avez pas parlé de ça plus tôt ? Mais si ! Quand les poules auront des dents. C'est ça. C'est clair comme de l'eau de roche. Je rêve d'introduire une bouteille de John Labatt Classique dans le vagin d'Andrée Lachapelle. Je suis comme un Bernard L'Hermite qui cherche sa coquille. Je me cherche et je ne me trouve pas. On a autant de chance d'attraper le Sida que de gagner Le Million. Alors pourquoi tant de panique ? Je le répète: je déteste les femmes. Les fameuses femmes. Et juste pour me faire chier, quand je vais devenir homosexuel, elles vont me courir après. Juste pour me faire chier, comme d'habitude. Pourquoi Dieu a-t-il créé la femme ? Pour emmerder les hommes ? On serait tellement mieux sans les femmes. Le salon de massage est plein de marins. La police est au Dunkin Donuts. Baudelaire dort au cimetière Montparnasse. Vanier est au Balmoral. Je voudrais me marier avec Barbara. Brigitte Bardot est aux phoques. Fuck. Je cherche le premier album de Jen Roger. Je vais finir comme j'ai commencé. Surtout pas au Commensal. Comme ceux qui végètent à rien. Tiens, je vais devenir vendeur de meubles, au Rond Point du Meuble, ou mieux encore, aux Ameublements Elvis. Je veux coucher avec Sylvester Stallone. Je dois un manuscrit à Gaston Miron depuis sept ans. Je ne m'appelle pas Claude Beausoleil. Hostie de kâlice de tabarnak. Je vais kâlisser une volée aux poseurs de la rue Laurier. Une vraie bataille de ruelle. De rocker. Ils vont voir c'est quoi la réalité. Mot à mot en sourdine, je me conjugue à l'impératif. Ah ! les seins de John Travolta ! Dans l'antre du verbe, j'avance à tâtons dans l'obscénité. Il paraît que l'orgasme ressemble à un court-circuit. Je me plante une aiguille dans le pénis et le branche dans une prise électrique. Quelle décharge ! Comment faites-vous pour être aussi con ? Je chie dans le bain parce que la toilette ne fonctionne plus. Dans mes vies antérieures, j'ai déjà été Gérard de Nerval. Ca vous en bouche un coin ? Comment faites-vous pour être aussi bouché ? Je ne lave plus les vitres. À quoi bon regarder dehors ? C'est à l'intérieur qu'il faut regarder, à l'intérieur de soi. La soie, ça stimule les couilles. Ah ! Vous n'avez pas de couilles. Dommage. Bon, passons... Je passe mon temps à trouver des réponses sans me poser de questions. Quand je m'ennuie, je M'écris. Mais je n'ouvre jamais les lettres, comme Erik Satie. Je n'ai pas de parapluie. C'est maudit. Surtout quand il fait soleil. J'ai deux gros orteils, comme tout le monde. Passer le temps, il n'y a que ça à faire. Le temps. Qu'est-ce que le temps ? Qu'est-ce que la trisomie 21 ? Je voudrais être épileptique. Ça fait de l'action. Autrement, la vie est endormante. Et quand on s'endort, on se couche. On dort. Et quand on dort, il ne se passe jamais rien. C'est bête. Oui, comme une bête. Une bête de somme. Ah ! Ah ! Alcoolique, vous dites ? Bien sûr ! Pourquoi pas ? Erik Satie, un buveur d'absence... Comment aborde-t-on Shakspeare ? En lui foutant une baffe ? Je ne suis pas. Non, vraiment pas. Je rêve d'être concurrent dans un quizz con. Je rêve d'être un con, juste pour une journée. Ca change les idées. Je fais pipi et je fais caca, comme tout le monde. Je déteste toujours les Chinois et j'en ai toujours le droit. Si ça ne fait pas votre affaire, allez vous faire voir. Je sais, aller se faire voir, c’est compliqué parfois. Mais je n'y peux rien... Je voudrais coucher avec une paraplégique. Je n'ai aucune logique. Qu'est-ce que la logique ? Je voudrais être vendeur dans une quincaillerie. Je suis trop exigeant, je sais. Mais comme dit le vieil adage, on n'a qu'une vie à vivre. Avez-vous déjà entendu parler de la cosmogonie des Dogons ? Je vous en parlerai plus tard. Pas trop tard, bien sûr, car vous devez vous coucher tôt, du fait que vous travaillez. J'aime toujours Anne, mais elle ne m'aime plus. Que la vie est donc mal foutue... La vie est mortelle. Croyez-vous au diable ? Diantre ! Nom d'une pipe ! Savez-vous ce que Popeye fait lorsqu'il est bandé? Il se trempe la queue dans l'huile d'Olive... Et maintenant, que vais-je faire, de tout ce temps que sera ma vie. Je n'ai jamais sucé Gilbert Bécaud. La contradiction n'est pas un antidote contre l'amputation. Tous mes voisins sont fous.



Samedi soir. Encore un autre samedi soir. Je travaille maintenant, j'ai plein de fric qui me sort par les poches et pourtant je suis toujours seul. À quoi bon travailler ? Quand j'étais pauvre, je pensais qu'avoir un emploi et de l'argent résoudrait tout. Quelle déception ! Quand je vois des filles en bas nylon et mini-jupe avec des jambons à moustache, vendeur chez Pitt Shoes, ça m'enrage. Je ne me prends pas pour un autre, mais tout de même, y'a des limites... Ça doit vraiment être un mauvais sort. J'en suis de plus en plus convaincu. Les femmes m'écoeurent. Se prennent pour des déesses. Leurs talons hauts, leurs bas et leurs sales lèvres rouges, leurs gueules de starlettes. Elles me dépriment. Moultes choses. Merde. Voulez-vous jouer avec moi ? Jouer aux fesses ? Non ? Ah! Vous préférez jouer au Monopoly ou au Scrabble... Il pleut depuis cinq jours. Non, pas vraiment. C'est Dieu qui pisse. Quand Dieu a créé le monde, il ne savait pas ce qu'il faisait. Il était saoûl. Et si Jésus revenait, il dirait: “Si vous saviez comme je regrette d'avoir fait le con à Nazareth.” Je me coupe un doigt en ouvrant la bouteille de vin. Le sang se répand sur le clavier de la machine. C'est pas grave. Je ne regarde pas l'heure. Est-ce que les singes savent, à l'heure ? Quand j'étais petit, j'étais petit. Pardonnez-moi, mon père. Un jour, j'ai pissé dans mes culottes. Un jour, j'ai avalé deux bouteilles d'aspirine et je suis allé porter des fleurs à ma mère pour la Fête des Mères. Mer et Monde. Monde de fous. Un jour, j'ai pleuré. Comme un veau. On me disait que ça ne valait pas la peine. De la grosse peine. Hostie que ça faisait mal ! Pour se sentir mieux, il faut manger beaucoup de chocolat. Ou sniffer de la thérébentine. Un jour, je me suis levé. Je n'ai jamais embrassé Julio Iglesias. Je n'ai jamais embrassé mon père. Je tète mes poux. Parfois, j'aimerais être un tronc d'arbre. D'autres fois, j'aimerais être un logarithme. Ça dépend du contexte, ou si le texte est con. Mourir de soif... Mourir, pourquoi ça semble si tragique?  Mourir, c'est ne plus vivre. Et vivre, c'est mourir à petit feu. Mais, mais, mais... Bof ! Après tout... Chiche alors ! Ou mince alors ! Merde encore une fois. Bon, que disiez-vous ? Rien ? D'accord. Des fois vaut mieux se la fermer. Rien ne va plus. Non, rien de rien, non je ne regrette rien. Un band français, les Washington Dead Cats, joue à la radio. Dehors, un chien jappe. Je vais encore me faire prendre dans les filets des filles. Je vais mettre cent dollars par mois à la banque pour mon nez. Dans un an, j'aurai un nouveau nez. On cessera de me prendre pour un arabe. Je suis italien, sacrement ! J'ai tellement souffert d'être un WOPS que j'en ai raz-le-bol de passer pour un arabe. Je mangerais Nathalie Mongeau. Ensuite Nathalie Lahaie. Ensuite Nathalie Cormier. En dernier, mal pris, Nathalie De Montigny. En fait, je mangerais n'importe qui. Mais surtout, et avant tout, Nathalie Mongeau. Je suis assis. Je réfléchis. Ça m'arrive. Ça me frappe en plein front. Je n'y avais pas pensé. Tant pis. Pipi, caca, dodo. J'ai mal quelque part, mais je ne sais pas où. Ça me démange partout, mais je ne sais pas pourquoi. Je ne sais plus rien. C'est mieux ainsi. Maintenant, je suis debout et je bataille. C'est normal. Je voudrais enculer Ronald Reagan. Jamais le premier soir, disait-elle. Alors quand ? Le deuxième soir, le troisième soir, le quatrième soir, le cinquième soir, le sixième soir, le septième soir, ou jamais ? Qu'elle aille se masturber. J'en ai rien à foutre. On n'est plus en 1940. Le couple. Quelle bêtise. Les enfants. La maison. Les paiements. Fuck. La vie, c'est la vie. Vous ne saviez pas ? La femme que je cherche est une Gaspésienne qui se tient dans les clubs western et qui boit de la grosse bière. Les femmes des Zéclopés, du Passeport ou tous ces genres de bars, je les ai dans le cul. Se prennent trop pour d'autres. J'aime les putes de chez Peeters. Elles sont réelles. Et aussi les indiennes de la Brasserie Alouette. J'adore les endroits mal-famés où se retrouvent tous les parias, les rejetés. Quelle merde que ces bars de branchés, de yuppies, de bon chic bon genre. Les jambons de Laval et leur blonde qui viennent danser au Métropolis. Criss. Un jour, je vais faire sauter cette stupide discothèque. En morceaux. Ca leur apprendra à jouer les Dallas de fin de semaine. Dimanche midi, j'attends André. Nous allons téléphoner à Herbert Huncke à New-York. Allons descendre à New York bientôt pour finaliser les derniers détails de la traduction. Une bonne virée à NYC, ça va faire du bien. J'écoute Johnny Cash qui chante “A boy named Sue”. Mais je ne suis pas encore saoûl. Ca va venir. Ca vient toujours. Je n'ai jamais fait de prison. Il faudrait que j'essaie ça un jour. Dans la vie, il faut tout essayer. Autrement, ça sert à quoi de vivre ? Hein ? Dites, ça sert à quoi de vivre ? Bosser comme un esclave, avoir un char, faire le tour des centres d'achats les fins de semaine, aller à Wildwood l'été, arriver à sa pension et mourir un an plus tard ? Vous appelez ça vivre ? Les gens ont trop besoin de sécurité. C'est quoi la sécurité ? Une connerie parmi tant d'autres. Je ne veux pas savoir ce qui va m'arriver demain. Si je le savais, je me suiciderais. Les gens veulent être sûrs de ce qui va leur arriver dans soixante ans. Vraiment ! Je le dis et le répète : les gens sont cons ! Plus cons qu'un crustacé. Une mouche est même plus intelligente qu'un être humain. C'est pas peu dire. J'exagère, vous dites ? Mais regardez-vous un instant, pas dans le miroir, non, regardez à l'intérieur et voyez comme ça pue la bêtise. Vous n'avez pas le “guts”, hein? Ca fait peur, n'est-ce pas ? Ca dérange les habitudes, la petite routine. Regardez donc à l'intérieur. La vaiselle, le lavage, ça peut attendre. C'est en dedans qu'il faudrait faire le grand ménage. Et justement, c’est le printemps.



Dimanche matin. Après le samedi soir, il y a toujours le dimanche matin. Alan et Walter sont passés hier soir. Je peux maintenant payer à boire à mes amis. Pour toutes ces années où ils ont payé pour moi. Je pense à Rutebeuf. Pauvre Rutebeuf. Je pense aux jambes de Marie-Christine. Je ne bois pas assez. Pour moi, rien n'est jamais trop. Ca fait tellement longtemps que je suis seul, que je ne saurais plus comment embrasser une femme. C'est tragique. Je rêve d'avoir le Sida. J'écoute des chants grégoriens en ne foutant rien. Tout juste en buvant du vin. Du vin de messe, criss. Je vais mourir. Et puis…? Qu’est-ce que ça peut faire ? Un grand trou, c’est tout. Quand je ne serai plus là, un autre délirera à ma place. Personne n’est irremplaçable. Mes draps sont maculés de sperme. C'est la faute à la solitude. J'écoute “Nuit d'été” de Calixa Lavallée. Je vis dans un trou. Est-ce que je vis ? Je vois Marie-Hélène au restaurant avec son chum. Ça me déprime. J'oublie tout. Ma guitare pleure. Elle a le Sido. Ma soeur vient d'avoir vingt sept ans. Quand j'avais son âge, j'étais à Paris. Elle demeure à Laval. Je suis un malade mental. C'est rien. Je ne veux pas être un saint d'esprit. Quand je me lève, je prends toujours une bière. Le café, c'est dégueulasse. Je ne mange pas. Manger, ça me fait vomir. Non, je bois. Systématiquement, comme disait Boris Vian. J'écoute les Beach Boys et vers midi j'irai voir la concierge pour lui dire que je ne veux plus la baiser. Qu'elle peux dormir en paix. Rest in peace, tant qu'à y être. Qu'elle aille se faire tuyauter par le plombier. J'écoute le Top 40 et je n'ai pas envie de chier. Le drame, c'est que j'ai exterminé toutes les coquerelles chez-moi. Maintenant, je m'ennuie. Les coquerelles, au moins, elles me tenaient compagnie. Elles avaient de la sympathie pour moi. Elles m'aimaient bien. Moi aussi, au fond. Elles ne font rien de mal, les coquerelles. Elles ne cherchent qu'à manger. C'est normal. Et comme je ne mange pas souvent, elles m'évitaient de jeter de la nourriture inutilement. Ca me faisait aussi mal au coeur de voir une coquerelle mourir de faim qu'un Ethiopien.



Je suis vulnérable. D’autres sont comptables. Ce soir, je laisserais n'importe qui me caresser les fesses. Même un gars. Je vois à travers le cercueil du Bien-Etre Social de Patrick Straram. La société traite bien ses artistes, elle leur tombe. L'histoire que vous lisez est vraie. Et les noms n’ont pas été changés. J'essaie de comprendre pourquoi la nourriture que nous ingurgitons se transforme en merde. C'est beaucoup plus important que d'essayer de trouver un sens à la vie. Y'a-t-il quelquechose de plus ridicule qu'un oeuf qui vous regarde le matin ? Quand les poules auront des dents. Dans la semaine des quatre jeudis. À la Saint-Glinglin. Aux Iles Mouk-Mouk. Nom d'une pipe! À propos, ça fait un sacré temps qu'une fille m'a fait une pipe. Je snifferais de la gazoline. Je suis contre le fait d'être contre le fait.



Personne ne me comprend. Pas même moi-même. Tout de même! Même si... Avec des si on fait des do. Pas de sitôt. Si tôt est le mieux, alors tant pis. J'écoute Claude Blanchard et je lis Jean-Luc Godard. J'écoute Vivaldi et je lis Edward Rémy. Je regarde Pierre Marcotte et je met jamais de capote. C'était la période des examens à l'Université. J'étudiais tranquillement dans la cuisine tandis que ma femme s'envoyait en l'air dans la chambre à côté avec un nègre. De temps à autre, je jetais un coup d'oeil, histoire de me changer les idées de la syntaxe anglaise. Voyons, où en étaient-ils maintenant ? Ah oui, elle le suçait. Bon- très bien, c’est agréable de se faire suçer. Même moi, j'aime ça. Alors si le nègre aime ça, tant mieux, faut bien se faire plaisir dans la vie, non ? Vous n'aimeriez pas ça regarder votre femme suçer un nègre ? Moi, j'adore ça. Donc, je me replongeai dans mes livres et mes notes en buvant café sur café. Et à nouveau, de temps à autre - comme je disais je jetais un coup d'oeil. Cette fois, c'était la pénétration en règle, ma femme les jambes grandes ouvertes, le nègre y allant d'un va-et-vient reggae. Elle hurlait. Il haletait. C'était si passionnant que je laissai de côté mes études pour un moment pour observer la scène de plus près.



Je me glissai subpreticement jusqu'à la porte de la chambre. La vue était magnifique. Je voyais les valseuses du nègre qui tangaient à bonne fortune, les mains de ma femme sur ses fesses. Soudain, elle me vit dans l’embrasure de la porte. Elle me décocha un de ces sourires qui veulent tout dire. Je le lui rendis, et je retournai à mes papiers. La vie n'est pas compliquée, après tout... Si votre femme a envie de se faire baiser par quelqu'un d'autre, laissez-la donc faire au lieu de piquer une crise. Ca vous mènera seulement à la crise ultime : cardiaque. Et mettez-vous à la place du mec. Il ne veut que baiser, lui. Vous ne voulez pas baiser, vous ? Que ce soit votre femme ou une autre, qu'est-ce que ça peut foutre ? Ce n'est que du foutre. De la vulve et du gland. Le déboisement de l'Amazonie est beaucoup plus important que ce foutu détail que votre femme baisant avec quelqu'un d'autre. Franchement, vous êtes con ! Vous aimez ça être con ? Bien restez con...

Ma femme aussi m’a déjà regardé baiser. Avec la petite Josée…

Une nuit, elle revenait saoûle-morte d'un bar. J'étais en train de suçer la petite dans la salle de travail. Voilà donc ma femme qui entre, longe le corridor en faisant un tapage infernal et, arrivée devant la porte, elle s'exclame : “Oh la la! Mais ça gaze! Et elle vient s’assoir à mon bureau. Elle se met à lire mon dernier texte pour Hobo-Québec. Puis, je pénètre la petite en disant à ma femme que ce qu'elle lit n’est pas la version définitive. Et, pendant que la petite s’agite, je dis - toujours à ma femme - j'aime bien faire plusieurs choses à la fois - que j'ai appelé Jean-Yves Reuzeau à Paris et que le prochain compte de téléphone risque d'être très élevé. “Combien de temps lui as-tu parlé ?”, dit-elle. “Au moins une heure”, dis-je, en éjaculant. Puis, la petite, ma femme et moi sommes allés boire ce qui restait dans le frigidaire, c'est-à-dire trois bouteilles de vin mousseux cuvée St-Vincent-de-Paul. Vous pensez que vous êtes heavy?



Vous feriez mieux de redevenir obsédé, sinon les tumeurs dévoreront le cheeseburger de votre cerveau. Un pied dans la tombe, l'autre dans la crotte de chien. Est-ce que par hasard, le hasard ne serait qu'un hasard ? J'aime les farces de Newfie et les toiles de Modigliani. Les petits villages de Gaspésie et le manifeste de Marinetti. J'ai loué une chambre au paradis. Je fréquente le Bar de la Première Chance. À côté de moi, Malcolm Lowry était un Alcoolique Anonyme. Ah, je sais, vous allez gueuler “C'est pas vrai, mais pour qui tu te prends ?” Je ne me prends pas. Ah, jadis, j'ai essayé de me prendre - tout comme j'ai essayé de me pendre - je disais donc... ah oui, j'ai essayé de me prendre. Ca n'a jamais marché. Je n'avais pas le pénis assez long pour m'enculer. J'écoute les Fugs et je bois une Bud. Je n'aime pas la Bud, mais quelqu'un en a laissé dans mon frigidaire et, vu que je n'ai pas envie de sortir avant quinze minutes - notez bien, quinze minutes exactement, pas plus, pas seize, pas quatorze, non quinze - donc, de toute façon, je bois n'importe quoi. Même de l'After-Shave. Ca donne une bonne haleine pour draguer les filles de l'Express. Vous est-il déjà arrivé de pleurer au lieu de faire crisser les pneus de votre Trans-Am ? Vous est-il déjà arrivé de vous caresser en pensant que c'était quelqu'un d'autre qui vous caressait ? Vous est-il déjà arrivé de vous regarder et de ne pas vous voir? Sous quelle étoile êtes-vous né ? Une bonne ou une mauvaise? Moi, je suis né sous une étoile filante. Une étoile heavy métal. Mes fesses, elles appartiennent à tout le monde. N'importe qui veut les pogner peut le faire. Je suis la poupée qui fait oui. Les poubelles, c’est poétique. Je vais aller à Place aux Poètes, chez Janou, et lire tous les textes du premier album des Classels. Ensuite, au bar, on pourra causer de Neitszche. Et pleurnicher sur l'existence des sauterelles. Sur le sort réservé aux maringouins. Excusez-moi une minute, je vais revenir, mais pour le moment, j'ai envie de venir. Je laisse donc la machine à écrire que je suis, mais ne partez pas, je reviens... Je me lève, enlève tous mes fringes, - à poil ! - me couche sur mon lit et me masturbe en pensant à mon meilleur ami me tenant dans ses bras. Puis, je viens sur mon oreiller. Ca lui fera des choses à me raconter dans mes rêves. Vous pensez toujours que vous êtes heavy ? Attendez. C'est dimanche après-midi. Encore, vous allez dire. Mais oui, c’est toujours le dimanche après-midi. Il règne un silence de mort dans le building et à l'extérieur. Un petit dimanche tranquille, comme l'aiment tant de tastas.. Je fous les Cramps à plein volume. Je veux que la police vienne. Faire venir la police... Hum... Bon, assez de bavardage, où en étions-nous ? Oui, oui, oui. Nous étions Chez Peeters, ouais, ouais, ouais. Y'avait plein de grosses bières sur la table. Oui, oui, oui. Je pognais le cul d'une Gaspésienne. Ah oui ! Je me souviens. Et son mari voulait coucher avec moi. Wow ! Mais au fond, vous étiez aussi saoûl que moi. Quand je suis sorti de Chez Peeters, j'ai marché longtemps sur la rue Ste-Catherine, scrutant la faune fuckée du samedi soir et je me suis finalement arrêté au Burger King, commandé trois cafés et me mis à réfléchir - oui, ça m'arrive - aux derniers jours de Gauguin aux Îles Marquises. Et, conséquemment, je me suis mis à penser que lorsqu'il y a une plotte dans les parages, y'a presque toujours un batt' qui suit. Un pauvre batt' qui suit la plotte. Parce que il veut mettre son batt' dans sa plotte. Juste pour ça. Le reste, c'est seulement parler pour parler, comme dirait Jeanette Bertrand. Non, mais soyons francs, ce qu'une femme veut, c'est une queue. Et ce qu'un homme veut, c'est un vagin. C'est simple et c'est clair. Alors, pourquoi placer des annonces dans La Presse genre “Femme de 43 printemps, vivant à la campagne, cherche homme sobre, nonfumeur et travaillant pour relation basée sur le respect et la tendresse”, quand tout ce qu'elle a besoin c'est un pénis entre les jambes ? Oui, un gros pénis gluant. Un shaft hérissant son clito. Que le matin, elle aimerait mieux avaler du sperme que son satané yogourt. Mais ça, elle ne le disent jamais, les femmes. Ah ! les fameuses femmes ! Elles préfèrent parler de bébé, de maison et de tondeuze à gazon. Elles sont tellement stupides, les femmes, que ce n'est pas surprenant qu'elles soient inférieures aux hommes. Qu'est-ce que vous voulez ? M'enculer ? Enculez-moi. Pourvu que ce soit durant la phrase de Morrison où il dit “Mother, I want to... “ Des fois, je suis une fille. Je n'ai pas de Remington Micro Screen, mais je me rase du mieux que je peux et quand je n'ai pas de fille, je me dis que ce serait excitant si un de mes amis m'enlevait mes petites culottes. Il verrait que ce n'est pas un vagin. Que je n'ai pas de seins. Mais, qu'est-ce que ça peut faire ? Vous avez déjà joué aux dés ? Alors, jouez avec mes couilles. Je suis aux femmes, aux hommes, aux animaux, au vent et tout ce qui existe. À quoi tout cela rime ? Parce qu’avant, en poésie, il fallait que ça rime. Et, comme diraient les gens du Lac St-Jean: “Ca rime en crime”. Laissez vos mains couler sur mes cuisses. Que pensez-vous de la situation en Israel? N'ayez pas peur, touchez, oui, c'est un pénis. Mais ce pourrait être un vagin si j'étais une femme. Mais je ne suis qu'une fausse femme entre vos mains. J'allonge la jambe comme une vraie pute pour que vous oubliez vos problèmes, mais après avoir éjaculé vous me détestez déjà parce que je suis un gars. Et moi qui vous aimais. Moi qui frémissais sous vos doigts comme Edith Piaf sous ceux de Marcel Cerdan. Moi qui ne faisais plus de différence entre homme ou femme. Vous avez remis vos culottes et vous êtes parti retrouver vos chums à la Brasserie pour leur dire que la veille vous avez fourré une hostie de prostituée. Et, dans le matin sombre et sale, j'ai pleuré comme une conne qu'on abandonne parce qu'elle a des boutons. Vous connaissez Lux Interior ? Non ? Pas surprenant que vous soyiez aussi tranquille. Est-ce que vous vous aimez ? Quand vous vous regardez dans le miroir, que voyez-vous ? Au fond, la vraie vie n'existe pas. Il n'y a que Coco Chanel. Je mettrai du rouge à lèvres, si vous voulez. Je mettrai du cutex sur mes ongles d'orteils. Mais j'aurai toujours un pénis, je ne vais pas le couper, tout de méme ! Si vous en avez un, je le suçerai doucement, comme si c'était un joujou d'enfants et vous pourrez venir dans ma bouche, je ne suis pas végétarien. Mon voisin frappe à ma porte. Je vais lui…



Bon. Assez parlé pour ne rien dire. Soyons sérieux. Bon. Bon, bon. Ah ! C'est bon. Quand votre blonde vous suce, est-ce qu'elle vous caresse les couilles en même temps ? Quand vous vous masturbez, avez-vous honte de vous-même ? Oui, votre vous-même, le vrai et profond vous-même ? Quand vous répondez au téléphone, dites-vous que vous n'êtes pas là ? Pourquoi ne voulez-vous pas coucher avec moi ? Allez, donnez-moi une raison valable. Une raison qui est incluse dans la police d'assurance. Sinon, vous perdez tout, moi y compris. La porte se referme sur le courant d'air. Mon voisin me demande si mon poêle fonctionne. Je lui dis que sans les locomotives, les trains resteraient en gare. Et gare au chien. Je viens de venir. Ca vous est sûrement arrivé de vous masturber en imaginant votre femme baisant une autre femme. C'est un fantasme acceptable, dirait-on. Mais votre femme se faire manger la vulve par votre meilleur ami, ça alors, noir ! Parce-que c'est votre meilleur ami ? Ou parce que c'est votre femme ? Et puis qu'est-ce que ça peut bien foutre, après tout ? Personne ne possède personne. Je fais ce que je veux. Même les pires vaches veulent de la sécurité. Et comme toutes les femmes, un jour, des enfants. Pourquoi les femmes veulent-elles toujours des enfants ? Quand vous avez envie de vous masturber, est-ce que vous éternuez ? Moi, si. Alors, je me déshabille, complètement, j'étends mon blouson de satin sur le lit, et là j'y vais d'un va-et-vient en pensant à des choses impensables. Mourir, c'est vivre un peu. Ce qui m'écoeure, c'est que les bars ferment à trois heures. Je me rappelle d'être allé enterrer une perruche dans le parc près de chez-moi. Un soir d'été. J'étais con. Je me souviens avoir planté un couteau dans un arbre, dans le même parc, un soir d'hiver. J'étais saoûl. En fait, vaut mieux être saoûl qu'être con. La petite Josée voulait toujours baiser, elle sur moi. Elle disait que cela venait du fait qu'elle avait le vagin in-versé. Un héritage de sa mère, apparemment. Donc, elle me montait dessus et twistait ses fesses autour de mon bâton. Quand elle jouissait, elle fermait les yeux et je lui mordais les oreilles. Son petit corps véreux frémissait sous mon pieux. Un soir, ma femme revenait d'un bar, comme d'habitude, mais son mec était retourné chez ses parents. Entre donc ma femme, tombant partout dans le corridor, comme d'habitude, et voilà qu'elle se pointe à la porte de la chambre. À ce stade, j'étais dans la petite jusqu'à la garde, le voisin d'en bas écoutait du western et le lavabo puait la vaisselle de deux semaines. Ma femme entre dans la chambre, enlève ses vêtements et se couche à côté de nous. La petite lui dit qu'elle a des gros seins. Qu'elle trouve ça excitant les gros seins chez une autre femme. Ma femme m'empoigne les bonbons d'une main et, de l'autre, elle caresse les cuisses de la petite. L'orgasme arrive à point. Rien ne sert de courir, il faut venir à point. Pendant que je reviens de mon orgasme, la petite frenche ma femme passionnément. À mon grand étonnement, ma femme, qu'est pas lesbienne pour cinq cents, se met à lécher la petite un peu partout, du cou jusqu' où vous savez où. Elle travaille la petite de la langue si bien qu'elle la fout dans tous ses états. Quant à moi, surexcité par une telle scène, je prends ma femme par derrière et, oh la la ! à ma grande surprise, la petite se met à me suçer les couilles. Comment vais-je réagir lorsque ma mère va mourir ?

 
 
Mario Campo  (1951-2006)

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